Zadi, hémiplégique et « wotrotigui »

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Il aurait pu faire la manche. Mais demander la charité est hors de question pour Zadi,  lui qui a perdu la moitié de sa mobilité. Pourtant la société ivoirienne ne lui en voudrait certainement  pas. Elle fait l’aumône à moins malade, moins handicapé que notre hémiplégique. Le jeune Zadi  est collecteur d’ordures ménagères du tout Akouédo depuis 5 années. Il  compte sur sa force réduite de moitié  pour remplir sa partie du contrat tacite signé avec des dizaines de foyers de ce gros village Ebrié aux airs de ville.

De leurs handicaps, il y a ceux qui ont décidé d’en faire tout un drame, pire, un prétexte pour demander l’aumône. Certes,  ils sont moins  présents aujourd’hui aux carrefours de la capitale économique, mais ils sont plus nombreux dans les marchés ainsi qu’aux alentours des mosquées. Ces manchots, aveugles, tétraplégiques, …et personnes défavorisées s’adonnent à la mendicité. Accompagnés ou seuls, ces partisans du moindre effort semblent avoir trouvé leur activité génératrice de revenus sur le dos d’une société éprise d’une certaine compassion coupable et complice  dans la pérennisation d’une génération de handicapés  aux mains tendues.

Il y a, a contrario, ceux qui encore habités  par la dignité  et l’honneur ont décidé de se retrousser les manches.

Zadi fait partie de ces derniers. Pourtant le défaut de  circulation de sang  du cerveau aux artères  lui a  laissé d’importants stigmates physiques et sociaux : l’abandon  de sa mère, la difficulté à s’exprimer correctement, la paralysie d’un pied et d’une main, la maladresse des troubles de la marche accompagnés d’une grande fatigabilité ainsi que des chutes d’un seul côté.

Mais sa poitrine, son menton, son bras et sa jambe fonctionnels et surtout sa volonté à toutes épreuves … voilà les  moyens de Zadi pour acheminer chaque jour son pousse-pousse chargé d’ordures ménagères du village  à la décharge d’Akouédo.  Un pas après l’autre, séparés de fréquentes pauses, Zadi est lent, il avance à son rythme et arrive en fin de matinée à atteindre son objectif : décharger tous ses clients de leur poubelle. « Je débute le boulot à 6H30-7heures, j’effectue 3 à 4 tours journaliers à la décharge pour le déversement des ordures. Je marque un arrêt à midi et finis à 15heures » affirme le jeune homme en sueur. Nouveau quartier, Basket, Etage, Mabri, ces sous quartiers abritent un grand nombre de ses clients. Son handicap et sa force à vouloir avancer en dépit de tout, ont touché des cœurs. Conséquence : Zadi a pratiquement tous les marchés des foyers du village. « Zadi est un petit  à encourager. Si je l’ai choisi comme unique prestataire, c’est plus pour l’encourager que pour le travail accompli, il est un exemple pour mes enfants et donne une leçon à tous ceux qui pensent qu’avoir un handicap est une raison valable pour ne rien faire » affirme un père de famille, fidèle client de Zadi.

Rémunéré à hauteur de 1000 Fcfa le mois par sa cinquantaine de famille, zadi, encore sous le couvert de son père épargne. Ses économies dit- il lui serviront à troquer son chariot à 4 roues pour un tricycle à  mini benne. « Avec ma mobylette, j’irai plus vite et je  ferai moins de tour à la décharge » Pour son avenir, Zadi n’en sait pas grande chose mais son présent, lui est assuré.

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