Quand "cou-tête-pattes" tacle le poulet

Sacré poulet !  De lui, rien ne se perd, tout est comestible et utilisable.   De la chair aux plumes en passant par les œufs et   les parties les plus improbables. Tête,  intestin, foie,  pattes. Tout y passe. Des parties autrefois bonnes pour la poubelle sont aujourd’hui source de revenus. Ce business est l’affaire de deux jeunes ivoiriens très en vogue à Akouédo village, Dieudonné et Hugo. Ces sans-emploi ont fait de ces parties  insolites du poulet  leur  marque déposée.  Détachées, minutieusement nettoyées, badigeonnées de gras,  poivrées, puis cuites à la vapeur. Cette  innovation  fait le  bonheur et le plaisir  des clients qui en redemandent, parfois même au détriment des autres parties charnues du poulet. Quand les accessoires et divers  rivalisent avec le produit de base cela donne  l’histoire de « cou-tête-patte ».

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Hugo à l’oeuvre!

Dimanche 22 février 2015, cette fin de week-end est un jour de recette chez « hugo boss ». 10 heures les poulets commandés la veille à la ferme de Bingerville arrivent avec le paquet spécial. Le « cou- tête –pattes » est séparé de chaque poulet. Ce jour, 10 paquets sont livrés,  c’est peu et nos cuisiniers le savent, pour preuve la moitié est  déjà commandée. «  Il faut deux poulets pour un bon paquet de cravate, l’autre nom de  cou-tête-pattes. Je vais essayer de combler le vide par du poulet » précise Hugo visiblement intrigué par le nombre peu suffisant de sa marchandise. Produit vedette du « rônier » nom du maquis situé en bordure de la route principale du village, « cou-tête-pattes » est la priorité. Ces parties subissent un toilettage minutieux puis sont placées en tas. Ensuite vient le moment de l’assaisonnement puis le premier contact avec le feu de bois. « La fumée donne une touche particulière au poulet » ajoute Hugo, le » braiseur » , travailleur très enfumé. 20 minutes plus tard c’est le retrait puis une marinade pour une autre cuisson à la vapeur.  Les tas sont exposés  comme des appâts et les clients mordent à l’hameçon pour 750 fcfa l’unité. Des propriétaires de grosses cylindrés pour la plus part. «  Contrairement à ce que vous pensez mes clients sont  des boss (terme désignant les personnes cossues). Ils aiment trop et choisissent cou-tête-pattes sans problème, sans complexeC’est bien fait et rapide » ajoute fièrement  le trentenaire aux manœuvres.

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le plat de « cou-tête-pattes » est servi!

2 heures plus tard, rupture de stock des parties prisées. Les clients qui arrivent à ce moment sont déçus et acceptent difficilement l’autre choix, le poulet. Ils rouspètent «vous ne pouvez pas prendre assez de cou-tête-pattes, vous savez pertinemment que nous aimons bien cela et qu’aujourd’hui est jour spécial donc envoyez assez! » lance un client mécontent.  Après une longue partie de négociation et de marketing en faveur du poulet c’est l’acceptation pour certains et le refus pour d’autres. Le paradoxe, « le poulet est bien plus charnu que ces parties là mais ils aiment et  ce n’est pas fait pour nous déplaire.   Aujourd’hui, nous n’avons pas eu assez et  nous comprenons leur mécontentement » Interrogés pour tenter d’élucider cet engouement  pour ces parties des clients disent aimé tout simplement «  La chair de poulet   contient trop de produits chimiques contrairement à ces parties saines qui m’occupent, j’aime grignoter » se justifie Bayé-bi un client fidèle. Le poulet est à 3500 et jusqu’à 1 heure du matin Hugo n’a pu vendre son stock du jour .Il a compris son erreur et  compte renforcer le stock en achetant des paquets individuels sur le marché.

 Les vendeurs ont 4 années d’expérience au compteur et subviennent à leurs besoins et à ceux de leur famille. « Il y a  de l’argent dans cette affaire, c’est nous même les ivoiriens qui jouons avec. En tout cas nous avec notre petit coin ça va très bien » concluent- ils.

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